Le joueur d’échecs, David Sala

Le joueur d’échecs est un album de David Sala d’après la dernière nouvelle de Stefan Zweig écrite avant son suicide. Il est paru en octobre 2017 chez Casterman.

1941. Sur un paquebot en partance de New York pour l’Argentine, le champion du monde des échecs en titre décide d’affronter un aristocrate viennois qui semble posséder une incroyable maîtrise de jeu. Mais derrière ce talent hors norme se cache un terrible secret.

J’avais lu et adoré la nouvelle de Zweig, il y a de cela bien des années, et j’ai ouvert cet album avec curiosité. Quelle réussite et quelle claque ! Visuelle, tout d’abord, avec cette ouverture magistrale sur le bâtiment qui embarque ces voyageurs en partance de New York pour Buenos Aires. David Sala transforme son album en véritable œuvre d’art et chaque vignette est un tableau en soi. Le trait est soigné, avec un petit quelque chose de désuet qui rappelle les caricatures du début du XXe. Les couleurs douces, dans des tons froids – hormis les visages des personnages – invitent le lecteur à cette traversée unique.

David Sala manie la perspective avec brio et joue sur les angles de vue pour mieux embarquer son lecteur dans cette intrigue qui dénonce la tyrannie et la barbarie nazie. Les vues intérieures sont autant d’occasion pour l’auteur de glisser des références aux échecs, par des quadrillages savamment dessinés qui rappellent subtilement le damier autour duquel tourne l’intrigue. Le rythme est lent, les cases défilent parfois sans texte et donnent à voir la vie d’oisiveté des nantis à bord. Chaque case est un réel enchantement pour le lecteur, happé par cette partie d’échecs pas comme les autres.

J’ai mis du temps à ouvrir cet album, rebutée par sa couverture et son personnage central qui me semblait déplaisant par ses traits émaciés, mais je suis sortie K.O. de cette rencontre. Une adaptation des plus réussies, à lire, absolument.

Cette semaine, c’est  Moka  qui nous accueille chez elle et rassemble les billets des amoureux des bulles !